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Consultation mémoire de ville et consultations mémoire hospitalières

La nécessité de poser un diagnostic précoce (suivi d’une prise en charge précoce) des maladies de la mémoire est maintenant établie par l’HAS[1], l’AAN, L’INSERM et l’OPEPS[2]. En France on estime que plus de 850 000 personnes sont atteintes de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie apparentée, ce qui représente 6% des personnes de plus de 65 ans. On dénombre aujourd’hui près de 225 000 nouveaux cas par an[3]. Une forte augmentation du nombre de personnes malades est attendue dans les années à venir.

Cependant, sur les 850 000 personnes atteintes d’une maladie de la mémoire, la moitié seulement font aujourd’hui l’objet d’une prise en charge adaptée. L’importance du sous-diagnostic a été mise en valeur dans le cadre du Plan présidentiel Alzheimer 2008-2012, et constitue un des phénomènes les plus discutés avec, en parallèle, la difficulté pour le médecin à annoncer le diagnostic.

Les médecins essayent d’établir un diagnostic le plus précocement possible afin d’envisager une prise en charge adaptée. Le but étant de maintenir la personne le plus longtemps possible dans la première phase, à un stade où la maladie n’est pas encore stigmatisante pour le malade et ses proches.

Un diagnostic précoce permet d’initier une prise en charge précoce qui se traduit :

- pour la personne malade par un traitement par un ou plusieurs médicaments, une rééducation par un personnel spécialisé (sur la mémoire, le langage, la motricité), l’accompagnement par une équipe médico-sociale, et le cas échéant par la mise en place d’une protection juridique

- pour l’entourage par un suivi et un soutien médical et psychologique, l’accompagnement par une équipe médico-sociale, une formation et une éducation sur la maladie, l’intégration à des groupes de paroles.

Ainsi, ce dispositif tend à ralentir l’évolution de la maladie, favorise le maintien à domicile du malade et retarde sa perte d’autonomie avant le placement en institution. Il améliore en outre la qualité de vie des aidants et du médecin traitant.

Depuis sa création en 2004, le réseau Mémoire Aloïs s’inscrit justement dans une démarche de prévention de la dépendance en favorisant le diagnostic rapide et précoce des maladies de la mémoire.

L’originalité d’Aloïs consiste à proposer des bilans neuropsychologiques en ville, avec un délai d’attente très raccourci par rapport à ce qui se pratique à l’hôpital, accessibles aux patients des médecins de ville, grâce aux psychologues spécialisés en neuropsychologie, que le réseau Aloïs salarie et poste en ville. Cette démarche a d’ailleurs été primée aux assises de l’innovation créées par l’URML IdF en 2008. Il a donc mis en place une consultation mémoire en ville, aux mêmes tarifs pour le patient que s’il avait consulté à l’hôpital. Elle contribue à apporter une réelle solution au problème des retards de diagnostics, aux diagnostics trop tardifs, aux délais trop longs, aux personnes non diagnostiquées…

La pratique d’un bilan neuropsychologique est un des éléments indispensables pour poser un diagnostic précoce de maladie de la mémoire, et d’envisager le cas échéant, rapidement, les diagnostics différentiels.

Or si on se réfère au circuit actuel et habituel en France avec un bilan neuropsychologique accessible uniquement à l’hôpital sur prescription de médecins hospitaliers : le délai nécessaire pour poser un diagnostic en France est de 2 ans (temps entre le début de la déclaration de la maladie et le diagnostic)[4]. C’est trop long ! Et les patients sont diagnostiqués à un stade modéré (MMSE : 18/30)[5], correspondant à la deuxième phase de l’évolution de la maladie. C’est trop tard !

En France, seulement 30% des patients sont diagnostiqués à un stade léger. Or, le modèle mis au point par Aloïs contribue à augmenter le nombre de patients diagnostiqués à un stade léger. Ce concept est donc à dupliquer sur l'ensemble du territoire régional et national afin d'augmenter le nombre de patients pour lesquels un diagnostic est posé durant la première phase de la maladie, en amont de la dépendance, à un stade où la prise en charge permet encore le maintien à domicile, et ce dans un délai rapide.

Les consultations mémoire hospitalières pourraient ainsi être désengorgées par ces consultations de ville et de ce fait offrir un accès plus rapide, plus facile et plus adapté aux patients polypathologiques ou ayant des pathologies rares ou complexes.

On pourrait tout fait imaginer un système où le médecin (généraliste ou spécialiste), en fonction du type de patient, pourrait choisir de l'adresser ou bien vers une consultation mémoire de ville (plainte de mémoire simple) ou bien vers une consultation mémoire hospitalière (plainte de mémoire accompagnée de troubles aigüs).

L'efficacité de chaque structure s'en trouverait ainsi renforcée.


[1] Voir : Recommandations professionnelles de l’HAS (Haute Autorité de Santé) « Diagnostic et prise en charge de la maladie d’Alzheimer et des maladies apparentées » - Mars 2008. Disponible sur www.has-sante.fr

[2] Office Parlementaire d’Evaluation des Politiques de Santé, rapport sur la maladie d’Alzheimer et les maladies apparentées, 2005, Assemblée Nationale n° 2454, Sénat n° 466 .

[3] Institut national de la santé et de la recherche scientifique (Inserm). Maladie d’Alzheimer : enjeux spécifiques, médicaux et sociétaux. Expertise collective. Paris : les éditions Inserm, 2007 : 654 p.

[4] Bond J., C Stave et al. (2005) “Inequalities in dementia care across Europe : key findings of the Facing Dementia Survey. “Int J Clin Pract. Suppl” (146): 8-14

[5] Ramarason, H., C. Helmer, et al. (2003) Prevalence of dementia and Alzheimer’s disease among subjects aged 75 years or over : updated results of the PAQUID cohort. “Rev Neurol (Paris)” 159 (4) : 405-11

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